estuaire Irremediables abandons

LE FLEUVE EST AUSSI UN FRERE

Traduction littérale: Denys Bélanger
adaptation littéraire: Bernard Pozier


 Le fleuve s' est asséché. 
 Au fond de ses anses vides 
 le vent raconte de poussiéreuses histoires. 

 Dans l'absence de ses eaux 
 le soleil esquisse des sillons et des ossements terreux. 
 
 La lune pleure la perte de son visage de nuit. 

 Le fleuve s' est asséché. 
 Son lit déserté 
 il attend les bontés des lamentations d'un soleil obscurci 
 pour ainsi récupérer son nom 
 son vocable d'humidité et de fracas 
 orné de suites de vagues 
 de boue 
 de cascades. 
 
 Le fleuve asséché 
 vieillard a la peau froissée 
 souhaite réincarner sa fatigue 
 dans le courant vert d'autres eaux 
 fraicheur de brises nivéennes 
 neuves mélodies de torrents diaphanes. 
 
 Le fleuve asséché 
 réve a s'imaginer 
 gonflé de vies écaillées 
 de lichens 
 de mousses. 
  
 Il souhaite s' abandonner au soleil de toutes les 
 exubérances. 
 
 Il désire miroiter a nouveau 
 les caprices lunaires et astraux 
 de qui s'oppose a lui dans l'espace. 
 
 Il regrette les tourbillons 
 les cerc1es concentriques 
 l' éc1aboussure 
 l'écume 
 et l'anxiété de ses propres vapeurs 
 qui furent jadis les hótes 
 de ses cavernes désormais désertées. 
 
 Le fleuve sec 
 
 affectionne cependant la moindre cavité 
 l'imaginant tel un puits de surprises 
 de reliques 
 d'hamecons 
 de deniers du désir 
 pour ses propres volontés malabares. 
 
 Il aime le souvenir 
 de quelques pieds déchaussés le foulant 
 de quelques corps dénudés lui prétant leurs caresses 
 et la danse ardue de l'arbre 
 qui en lui contemplait son reflet. 
 
 Le fleuve sec 
 comprend l'achevement de son temps. 
 
 Cela l'indigne de ressembler a l'homme 
 qui comme lui devient sec 
 sans vestiges 
 également vidé de ses eaux. 

   

EL RÍO TAMBIÉN ES UN HERMANO
 
                                                                        a la añoranza del
                                                                     Río Atoyac en Oaxaca
  
 El río se ha secado.  
 En el fondo de sus cuencas vacías  
 el viento narra historias de polvo.  
 Con la ausencia de sus aguas  
 el sol dibuja esquelas y esqueletos de tierra.  
  
 La luna llora el extravío de su rostro nocturno.  
  
 El río se ha secado.  
 Con su ruta desierta espera las bondades  
 del llanto de un cielo oscurecido  
 y así recuperar su nombre  
 su nombre de humedad y ruidos  
 ataviados de oleajes  
 de lodo  
 de cascadas.  
  
 El río seco  
 viejo de pieles arrugadas  
 quiere reencarnar su cansancio  
 en la nueva corriente de otras aguas  
 frescor de brisas níveas  
 y otro cantar de diáfanos torrentes.  
  
 El río seco  
 sueña a soñar que vive lleno  
 de vidas escamadas  
 de líquenes  
 de musgos.  
 Le quiere presumir al sol de exuberancias.  
  
 Desea espejear de nuevo  
 caprichos lunáticos y astrales  
 de quien se opone a él en el espacio.  
 Extraña los anillos  
 los círculos concéntricos  
 el salpicar  
 la espuma  
 y la ansiedad de sus vapores  
 que alguna vez fueron los huéspedes  
 de sus cavernas hoy vacías.  
  
 El río seco  
 sin embargo ama de sí cada oquedad  
 la cree futuro pozo de sorpresas  
 de reliquias  
 de anzuelos  
 de monedas comprándole deseos  
 a sus propios deseos malabares.  
  
 Ama el recuerdo  
 de algunos pies descalzos caminándole  
 de algún cuerpo desnudo en él acariciándose  
 y la danza codiciosa del árbol  
 que en su adentro el reflejo se miraba.  
  
 El río seco  
 comprende la finitud de su tiempo.  
  
 Le enfada parecerse al hombre  
 que igual queda reseco  
 sin reliquias  
 igual se le termina el agua.  

Andrea Montiel